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Février 2018
La première étape du processus secret des alchimistes dans leur quête magique s'appelle « l'œuvre au noir ». Elle consiste à séparer et dissoudre les substances en vue de leur recomposition future en quelque chose de rare. Les trois artistes Nadine Altmayer, Francis Limérat et Edward Baran ont cette convergence dans leurs travaux. Chacun à sa manière s'attache à travailler les éléments constitutifs, voire constructifs, de leurs œuvres. Les trames, les squelettes, les ossatures prennent corps et sens.
Comme pour l'édification d'une construction, ce travail de la structure donne à leurs travaux un exceptionnel rapport à l'espace, bien qu'il soit quasiment à plat. S'agit-il de peinture en volume ou de sculpture fine ? L'air y devient un de leurs outils de travail. Cette spatialité y est une respiration qui apporte l'équilibre aux masses sombres. Car là aussi ces trois artistes se retrouvent, dans l'utilisation d'une palette en apparence réduite au noir.
Par les reflets ou leur absence sur les surfaces, les ombres, les transparences, les contrastes sont la preuve que la lumière, y est essentielle et indissociable. Ces artistes ont la redoutable exactitude technique de la maîtrise des éléments qu'ils mettent en œuvre ainsi que ceux qu'ils y invitent. L'air et la lumière sont leur « matériaux collatéraux ».
Ces allers-retours entre destruction en vue d'une reconstruction, le jeu avec des éléments concrets et d'autres seulement induits, la volonté partagée de réaliser des pièces qui offrent une présence spatiale forte ; montre bien que ces trois artistes ont touché au succès de l'alchimie, et que l'œuvre au noir est bien leur matière.
François Kenesi