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Ainsi de Suite

Nadine Altmayer & Christian Grelier

Janvier 2023

Toute répétition n’est pas vaine. Certaines redites sont même utiles, soit qu’elles marquent un point, soit qu’elles enfoncent le clou. L’acte toujours recommencé procure la satisfaction de la chose bien faite, l’assurance d’un résultat égal sinon meilleur, à chaque récidive. D’autres voies s’ouvrent, en insistant. Des voies insoupçonnées, que l’on croyait sans issue. 

Nadine Altmayer et Christian Grelier le savent. Jamais las de tirer des lignes brèves, illimitées, raides ou lascives, ils poursuivent, comme d’habitude, un ouvrage appliqué et suffisamment simple pour être accompli sans y songer. Un ouvrage né de gestes connus, familiers à ce point qu’ils consolent, réitérés donc, durant des heures, des jours et des nuits d’affilée. Alors, dans un mouvement contraire, le temps s’immobilise et accélère. Certes, les moyens diffèrent : Altmayer tisse, Grelier trace. Mais du fil au fusain, la fin est similaire : un art pauvre, brut, charnel, un art des origines qui s’observe longuement, comme on regarde un puits. Devant cette armée de résilles fragiles, de fétiches tout puissants, face à ces jardins zens bredouillant au mur des caractères illisibles, force est de garder le silence. Un effet apaisant dû à leur palette maigre qui, exception faite de touches bleues, rouges ou rouilles, s’en tient religieusement au noir et blanc. Cette gamme duelle est un gage de paix : côté obscur et désir de clarté se valent, du moins en apparence. Car au fond, l’équilibre est précaire, et des traces de lutte se devinent, signalant le chaos tapi dans un coin, un creux ou un plein. Si de près, la surface est blessée, c’est que chacun la brutalise : Grelier la roue de coups de spatule, Altmayer l’entame à la ponceuse. Criblées de cratères ou polies, leurs mailles délicates semblent dater d’hier et revenir de loin. Quand soudain, elles s’agitent, un air de mystère flotte, tel un souffle de vie. 

Virginie Huet